Article paru le 12 décembre 2021 dans la section Opinion – Lettres du journal Le Devoir.

Auteur: Denys Chouinard, archiviste

Deux jours après la publication de l’article de Catherine Lalonde sur la vision d’avenir de Marie Grégoire à la tête de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ), Carol Couture, ex-conservateur des archives de BAnQ, s’est demandé samedi si la nouvelle présidente-directrice générale, qui s’interroge sur le grand virage numérique entrepris par ses prédécesseurs, n’est pas en voie de faire passer l’institution qu’elle dirige de locomotive à wagon de queue. En d’autres mots, ne risque-t-on pas de transformer le navire amiral en vaisseau de deuxième rang ?

BAnQ est la formidable réunion de deux grandes institutions documentaires (Bibliothèque nationale et Archives nationales) dont les ressources ont été mises en commun afin de leur donner les moyens de mieux servir l’ensemble des citoyens du Québec, où qu’ils se trouvent sur le territoire.

Dans ce but, ses dirigeants avant Marie Grégoire ont misé sur la numérisation en masse des documents papier afin d’optimiser l’accès au patrimoine archivistique du Québec, ce qui s’inspire d’ailleurs d’une tendance mondiale en la matière. Le travail à réaliser est certes encore colossal, mais BAnQ et les multiples services d’archives du Québec s’y sont déjà attelés, et l’heure n’est pas à ralentir l’entreprise. Au contraire, il faut la favoriser, ce qui ne semble pas être la priorité de la nouvelle p.-d.g.

Le premier ministre du Québec, François Legault, se dit fier des Québécois qui font preuve d’innovation, de dynamisme et de dépassement. C’est précisément dans cet esprit que les archivistes du Québec ont conçu la Déclaration québécoise sur les archives (devenue Déclaration universelle par l’UNESCO) dans laquelle ils affirment toujours, depuis 2006, que tous les efforts doivent être faits pour que l’exceptionnel patrimoine historique de la collectivité soit mis à la disposition de tous les Québécois, et ce, par tous les moyens technologiques présents et à venir. En pratique, cela veut dire avoir accès à distance en quelques clics à des documents qui témoignent des réalisations du Québec, de ses institutions, ses entreprises et ses citoyens. « L’expérience BAnQ » dont parle Marie Grégoire devrait consister en un coup d’accélérateur en matière de numérisation et non en un coup de frein. Et sa tâche consiste à obtenir les ressources nécessaires pour y arriver. 

Présumons qu’elle corrigera la désolante première impression provoquée par ses propos à la journaliste du Devoir. Souhaitons qu’elle voie grand et sache donner au prestigieux navire qu’elle commande encore davantage de panache.

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