11h00 à 12h00 – « Les pratiques collaboratives en archivistique : vers une redéfinition de la mission de l’archiviste » – Animée par Taïk Bourhis

Qu’est-ce qu’un portrait des pratiques collaboratives en archivistique telles qu’elles se manifestent dans les contextes gouvernemental et culturel, nous apprend sur la manière dont l’archiviste s’y taillera une place?

1 - Les pratiques collaboratives en archivistique : vers une redéfinition de la mission de l’archiviste, avec Siham Alaoui

Les développements technologiques ont changé les rapports qu’entretiennent les acteurs organisationnels et publics avec l’information. Avec le discours actuel misant sur la participation et la collaboration citoyennes dans la vie publique, les modalités de diffusion l’information documentaire numérique se réinventent. Sur la scène publique, on assiste au développement du mouvement de gouvernance ouverte, lequel se décline en trois dimensions, à savoir (1) le gouvernement en ligne (e-government) misant sur l’efficacité administrative, l’automatisation des transactions entre les citoyens et l’État et la mise en ligne de l’information sur les services, (2) le gouvernement ouvert (open government) qui prône la transparence et le partage du pouvoir entre l’État et les citoyens, notamment à travers (3) la libération des données gouvernementales ouvertes (open government data), traduisant la diffusion des données publiques dans des formats interopérables et réutilisables par les citoyens. La gouvernance ouverte encourage le dialogue entre les institutions publiques et les citoyens, dans le sens où ces derniers sont plus aptes à exprimer leurs besoins en termes d’accès à l’information, que ce soit sur les services, ou encore sur les décisions gouvernementales. Les citoyens deviennent dès lors des collaborateurs à la vie publique, puisqu’ils orientent les processus de diffusion de l’information sur les différentes plateformes gouvernementales (Québec.ca[1], DonnéesQuébec.ca[2], consultation.quebec.ca[3]).

 

Par ailleurs, la collaboration touche non seulement le milieu gouvernemental, mais aussi celui de la culture. Dans les milieux des Archives, on assiste au développement des pratiques de l’archive participative (participatory archives), où des initiatives de production participative (crowdsourcing) s’opèrent sur des plateformes numériques (le projet Chronoscope[4] par exemple). Les citoyens sont invités à participer à la valorisation des archives en mettant en lumière leur intérêt historique ou patrimonial (description, annotation, etc.), ou encore, en en améliorant la qualité physique (transcription, numérisation, etc.). Dans la même lignée de pensée, le contexte de la pandémie actuelle de la COVID-19 a fait émerger des initiatives de documentation dite « citoyenne » de la crise. Les citoyens y sont invités à partager les témoignages de leur vécu, bref, de documenter leurs expériences afin d’en tirer des leçons pour les futures générations, que ce soit par le biais des photographies, des textes ou encore des enregistrements audiovisuels.

 

Si ces pratiques collaboratives, qu’elles s’opèrent sur la scène gouvernementale ou culturelle, s’avèrent lourdes en bénéfices, elles comportent leur propre lot de défis. Il suffit de mentionner les enjeux en lien avec la répartition du pouvoir entre l’archiviste et les citoyens, les compétences numériques et documentaires qu’une telle collaboration commande, la propriété intellectuelle suite à la diffusion de l’information et des données, ou encore la communication et la coordination entre les différentes parties prenantes engagées dans ces projets. Dans ce contexte, l’archiviste se doit d’être un médiateur qui soutient le développement des espaces de dialogue et de compréhension mutuelle. Quelles sont donc les compétences socioprofessionnelles que cet expert de gestion de l’information documentaire doit développer dans ce contexte collaboratif ? Comment pourrait-il intervenir pour pallier ces enjeux ? Cette communication vise à répondre à ces questions, en dressant un bref portrait des pratiques collaboratives en archivistique telles qu’elles se manifestent dans les contextes gouvernemental et culturel, et comment l’archiviste s’y taillera une place, non seulement en tant qu’acteur de la gestion de l’information, mais aussi comme acteur social.

Siham Alaoui est candidate au doctorat sur mesure en archivistique et en communication publique à l’Université Laval, Québec (Canada). Elle détient un baccalauréat en sciences de l’information (obtenu en 2013 auprès de l’École des sciences de l’information, Maroc) et une maitrise en sciences de l’information (obtenue en 2015 auprès de l’Université de Montréal). Elle s’intéresse à la médiation documentaire numérique (gestion de l’information et des données), notamment dans le contexte actuel d’ouverture et de participation citoyenne. Elle est auteure de plusieurs articles scientifiques et professionnels publiés dans des revues spécialisées en sciences de l’information (ex. Archives, Revue canadienne des sciences de l’information et de bibliothéconomie, Documentation et Bibliothèques, Argus, Comma, Les Cahiers de la Documentation). Elle a aussi donné des communications et conférences dans le cadre des congrès et colloques.

 

[1] https://www.donneesquebec.ca/

[2] https://www.donneesquebec.ca/

[3] https://consultation.quebec.ca/

[4] https://chronoscope.net/