Table-ronde organisée par l’Association des Archivistes Francophones Belges (AAFB) et l’Association des Archivistes du Québec (AAQ)

15 février 2022, de 15h à 17h BRUXELLES – de 9h à 11h QC.

Activité gratuite, réservée à nos membres. Inscription obligatoire avant le 14 février.

Dégâts des eaux, incendies, forces physiques, vandalisme, ravageurs de toutes sortes, mais aussi lumière, poussière, humidité et polluants … Sont autant de menaces pour les archives que les professionnels de la gestion documentaire tentent de maîtriser au quotidien, au travers de l’adoption de mesures et de pratiques de conservation préventive. Toutefois, personne n’est à l’abri d’une catastrophe, d’origine naturelle ou humaine, provoquant la détérioration, voire la destruction et la perte de documents. Aussi, les professionnels savent toute l’importance d’anticiper en élaborant une solide politique de gestion des risques, ainsi que des plans d’intervention d’urgence. Lorsque la situation de crise survient, à quelles difficultés concrètes faut-il faire face ? Comment agir sur le terrain ? Comment définir et opérationnaliser les priorités ? Et, quand vient le temps de constater les dégâts, quelles préoccupations soulève la gestion de « l’après-crise », autrement dit comment assurer un avenir pour des collections mises à mal, après la catastrophe ?

Pour éclairer ces problématiques, l’AAFB et l’AAQ ont convié deux professionnel·le·s des archives à réaliser un retour d’expérience à partir de la gestion d’une crise vécue, respectivement en Belgique et au Québec, ainsi que des intervenantes des institutions belge et canadienne qui offrent une expertise en matière de conservation préventive et de restauration. La table-ronde, animée par une représentante du Bouclier bleu, sera une belle opportunité de discuter les moyens d’anticiper, d’agir et de réagir face à des situations d’urgence, particulièrement dans un contexte de croissance des risques liés à des désastres environnementaux ou des catastrophes humaines.

 

4 exposés et un temps d'échanges sur le thème!

Les intervenant·e·s : Maura Moriaux (CIPAR, Belgique), Michel Hamel (HB Archivistes, Québec), Wivine Roland-Gosselin et Françoise Collanges (IRPA, Belgique), Irene Karsten (ICC, Canada).

La table-ronde sera animée par Christina Ceulemans (Le Bouclier Bleu).

Pour en savoir plus, consultez le programme ci-dessous!

Premier retour d'expérience: Le CIPAR et les inondations en Belgique (2021). De la phase d'urgence aux concrétisations post-sinistre.

Le Centre Interdiocésain du Patrimoine et des Arts Religieux (CIPAR), fondé en 2017, agit comme un centre d’expertise destiné en priorité à appuyer et à encadrer les services diocésains du patrimoine, les fabriques d’église et les communes dans leurs tâches de gestion du patrimoine religieux conservé dans les églises paroissiales.

C’est dans ce cadre que le centre est intervenu dans la gestion et l’identification des dégradations provoquées par les inondations qui ont largement impacté la Wallonie durant l’été 2021. Le CIPAR a entrepris diverses actions concrètes au cours de la phase d’urgence : cibler les zones géographiques inondées pour déterminer quelles églises étaient potentiellement touchées, prendre contact avec les gestionnaires locaux, se rendre in situ pour constater l’ampleur des dégâts et assurer la transmission des informations entre les instances patrimoniales compétentes. Le centre a également participé à l’organisation d’opérations de sauvetage de patrimoine en danger. La province de Liège étant la principale zone impactée, le centre a donc soutenu en priorité les opérateurs diocésains de l’évêché de Liège.

La phase d’urgence révolue, l’ASBL poursuit la collaboration avec l’évêché pour assurer le suivi de l’évolution de l’état des sites impactés. De plus, elle va lancer une campagne de sensibilisation à la sécurisation des églises paroissiales (en ce compris la problématique des sinistres) et proposer aux gestionnaires un référentiel, ainsi que des fiches techniques prêt-à-l’emploi en matière de conservation du patrimoine. 

Intervenante : Maura Moriaux

Maura Moriaux est spécialisée en histoire de l’art religieux et détentrice de l’AESS (Agrégation de l’enseignement secondaire et supérieur). Ayant acquis de l’expérience professionnelle dans le secteur muséal belge et à l’étranger (Pays-Bas), elle a également travaillé dans le secteur culturel pédagogique et dans l’enseignement supérieur. Elle s’est également investie dans le milieu de la recherche scientifique au sein du département d’histoire de l’art et d’archéologie de l’UNamur. En octobre 2018, elle a été engagée par l’ASBL CIPAR, où elle est actuellement responsable de la gestion des inventaires et de la base de données interdiocésaine du patrimoine mobilier religieux wallon.

Second retour d'expérience: La récupération des archives de la MRC du Granit, après la catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic (2013)

Le 6 juillet 2013, un convoi ferroviaire comptant 72 wagons citernes transportant du pétrole déraille en plein centre de la ville de Lac-Mégantic, provoquant explosion et incendie détruisant tout sur une superficie de 2 km². 47 personnes perdent la vie.

La Municipalité régionale de comté (MRC) du Granit a ses bureaux au centre de cet incendie. Tout, absolument tout sera détruit. Il n’est donc pas question de restauration mais de reconstitution des archives de la MRC. Je fus appelé d’abord à évaluer l’importance de la perte en documents, puis à tenter une reconstitution des archives.

Intervenant: Michel Hamel

Michel Hamel est archiviste depuis 1998 et est diplômé de l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI) de l’Université de Montréal. Il est également associé principal et fondateur de HB Archivistes, une société regroupant des archivistes indépendants œuvrant surtout dans le secteur municipal. Michel Hamel a également donné des formations auprès du personnel de municipalité à travers le Québec et a participé à la création de logiciels de gestion des documents et des archives. Il a notamment collaboré auprès d’une firme informatique pour l’adaptation d’un logiciel européen au contexte québécois.

Les missions de l'Institut royal du patrimoine artistique (Belgique)

Présentation des missions et de la vision de l’IRPA : L’IRPA est un établissement scientifique fédéral sans but lucratif créé en 1948 qui inventorie, étudie, préserve et valorise le patrimoine de Belgique – les œuvres d’art, monuments et objets emblématiques liés à l’histoire de ce pays. En tant que centre de connaissances et d’expertise unique, il a pour charge d’établir un inventaire photographique, de mener des expertises et des analyses scientifiques, d’assurer un bon état de conservation du patrimoine qu’il traite, tant sur le plan matériel que visuel, ainsi que de valoriser et diffuser l’ensemble de sa documentation (scientifique, photographique et technique), ses données et son expertise. Grâce à une synergie interdisciplinaire et un large éventail d’expertises diverses et de technologies de pointe, nous œuvrons ensemble pour étudier le patrimoine sous tous ses aspects et le préserver. En outre, l’IRPA veille à diffuser largement ses connaissances. Le patrimoine est l’affaire de tous et l’IRPA tâche de transmettre ce message fédérateur.

Le contexte de la crise : Les inondations de la mi-juillet 2021 en Belgique relèvent d’un niveau de catastrophe exceptionnel, qui n’avait pas pu être anticipé, avec des zones très violemment touchées, principalement situées dans la région wallonne (francophone). Le contexte était particulièrement difficile, la pandémie ayant parfois fragilisé les populations et les sites patrimoniaux depuis plus d’un an, et la période estivale retardant et réduisant les possibilités de réponse rapide. La météo humide prolongée empêche également le séchage des bâtiments : on assiste donc à un développement de risques secondaires, tels que moisissures et champignons, qui endommagent le patrimoine souvent de manière irréversible et qui posent un problème sanitaire pour les personnes présentes sur place. Enfin, le manque structurel de préparation des sites patrimoniaux (très peu de plans d’urgence en place) a encore aggravé les dégâts.

L’implication de l’IRPA face à la crise : L’IRPA a rapidement saisi l’urgence de se mobiliser et d’intervenir pour la sauvegarde du patrimoine, en organisant une réponse à l’urgence de manière coordonnée. Elle a créé à dessein un comité de crise en y invitant des représentants d’autres institutions jouant un rôle actif pour tous types de patrimoine (mobilier, immobilier, immatériel) à différentes échelles géographiques et politiques du pays. Il s’agit d’autres établissements fédéraux mais aussi des acteurs associatifs et institutionnels. Cet investissement exceptionnel de l’IRPA, sur base volontaire, a porté ses fruits, tant pour le sauvetage direct du patrimoine que pour le développement d’une coopération nouvelle et inclusive entre des acteurs parfois peu habitués à travailler ensemble. Cela a permis de donner l’impulsion nécessaire pour une mobilisation coordonnée des acteurs du patrimoine.

L’implication de l’IRPA dans les crises à venir : L’investissement de l’IRPA dans la gestion de cette crise est porteur d’effets positifs à long terme pour la coopération à l’échelle nationale. Vu son rôle central et son statut fédéral, c’est aussi l’organisme le mieux placé pour coordonner l’analyse post-crise, dont les conclusions permettront de mieux prévenir et préparer la prochaine catastrophe. L’IRPA est aussi l’organisation qui regroupe en son sein l’ensemble des disciplines nécessaires à la recherche et au développement de protocoles pour les traitements de conservation et de restauration adéquats pour le patrimoine impacté. L’objectif est de tendre à l’avenir vers une collaboration formalisée, via la mise en place de protocoles de collaboration avec les partenaires des entités fédérées. Il est aussi porteur de perspectives importantes, tant pour encourager une réponse patrimoniale aux catastrophes à venir, que l’on peut anticiper avec le changement climatique, que pour la recherche scientifique, qui doit se construire sur l’étude de la genèse et des impacts de tels désastres.

Intervenantes : Wivine Roland-Gosselin et Françoise Collanges

Formée à la conservation-restauration du patrimoine , Wivine Roland-Gosselin a intégré l’IRPA en 2019 pour se spécialiser dans le conseil en conservation préventive. Depuis peu, l’IRPA s’est doté d’un nouveau champ d’expertise, celui de la durabilité, que Wivine a rejoint avec pour mission d’aider les institutions patrimoniales à faire face aux défis actuels liés à la transition durable. Elle travaille désormais à la prévention et la préparation pour la sauvegarde de tous types de patrimoine face aux risques majeurs comme l’incendie ou le dégât des eaux, et est engagée auprès du Comité belge du Bouclier bleu.

Historienne de l’art de formation, Françoise Collanges a travaillé dans plusieurs musées français en tant que  conservateur  adjoint,  avant  de  se  spécialiser  en  conservation  préventive  puis en conservation-restauration d’horlogerie. Un parcours qui l’a amenée à vivre en Angleterre, en Irlande et maintenant en Belgique. Elle s’est également formée à la gestion des risques majeurs auprès de l’ICCROM,  avec  qui  elle  collabore  parfois,  et  à travers  un  engagement  personnel  auprès  du  Bouclier bleu en France et en Belgique.

Pour en savoir plus sur l’IRPA: https://www.kikirpa.be/fr

Les rôles de conseils et de formation de l'Institut canadien de conservation

L’Institut canadien de conservation (ICC), un organisme de service spécial au sein du ministère du Patrimoine canadien, fait progresser la conservation des collections patrimoniales du Canada et en fait la promotion grâce à son expertise en science de la conservation, en restauration et en conservation préventive. L’ICC travaille avec les établissements et les professionnels du patrimoine pour faire en sorte que ces collections patrimoniales soient préservées et accessibles aux Canadiens et aux Canadiennes, aujourd’hui et dans l’avenir.

L’ICC a récemment développé un atelier en ligne, « Prêt à réagir ? Élaboration d’un plan d’intervention d’urgence pour les établissements du patrimoine » afin de répondre aux besoins institutionnels, d’atteindre un public plus large et de fournir des délais pour la préparation du plan d’urgence. L’atelier comprend cinq modules très interactifs :

  • Création d’une équipe d’intervention d’urgence pour les établissements du patrimoine
  • Élaboration de procédures d’intervention d’urgence immédiate pour les établissements du patrimoine
  • Élaboration de procédures d’intervention tous risques pour les établissements du patrimoine
  • Stratégies de sauvetage et de récupération des collections pour les établissements du patrimoine
  • Ressources pour assurer l’efficacité de l’intervention d’urgence

Chaque module d’atelier se compose de séances de d’une heure, tenues à environ une semaine d’intervalle. Avant les séances, les participants examinent les ressources documentaires, y compris les notes et les parties connexes du modèle de plan d’urgence de l’ICC. Entre les deux séances, ils effectuent des exercices essentiels qui contribuent directement à la création d’un volet de leur plan d’intervention d’urgence. Par exemple, dans un exercice simplifié d’évaluation des risques basé sur la méthode ABC, les participants utilisent les données fournies pour identifier les urgences les plus susceptibles d’affecter leurs collections, y compris les événements rares qui pourraient entraîner une catastrophe. Dans les sessions en ligne, des exercices simples complètent les présentations afin de garder les choses vivantes et d’aider les participants à retenir les informations. Des exercices de scénario d’urgence plus longs aident les participants à développer des stratégies d’intervention pour leurs institutions sur place et à démontrer les approches de la formation aux interventions d’urgence.

Ce nouvel atelier en ligne sera proposé pour la première fois en tant qu’atelier standard de l’ICC en 2022-2023. Il sera disponible éventuellement en anglais et en français. Finalement, cet atelier sera complété par une formation en personne sur le sauvetage et la récupération des collections, du matériel Web et des informations relatives à l’atténuation des risques et à la prévention des catastrophes.

Irene Karsten, conseillère en conservation préventive à L’ICC, nous offre de revenir sur son expérience en conseils et formation sur la gestion de risques et l’élaboration d’un plan d’intervention d’urgence.

Intervenant : Irene Karsten

Irene Karsten est conseillère principale en conservation préventive à l’Institut canadien de conservation. Depuis 2009, elle a mené des évaluations d’installations et des projets de gestion des risques pour des institutions patrimoniales au Canada. Elle a animé les ateliers au sujet de la préparation en cas d’urgence, y compris une version offerte en ligne. Irene a obtenu un doctorat (2003) en écologie humaine avec une spécialisation en science de la conservation des textiles à l’Université de l’Alberta, ainsi qu’un diplôme en techniques de conservation de l’art (1994) du Collège Fleming.

Pour en savoir plus sur l’ICC: https://www.canada.ca/fr/institut-conservation.html

Des questions sur l’inscription? Communiquez avec nous!

Sarah Lessire, coordinatrice de l’AAFB: secretaire@archivistes.be

Christine Machiels, coordonnatrice de projets à l’AAQ: infoaaq@archivistes.qc.ca 

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